Les Pionniers du Nouveau Monde Tome 1 : Le pilori

En 1755, la France et l'Angleterre se disputent le Canada au cours de batailles sanglantes dans lesquelles participent de nombreuses tribus indiennes pour les deux camps. Il faut dire que le jeu en vaut la chandelle. En plus d'être un immense territoire, le Canada regorge d'animaux dont les fourrures sont de plus en plus prisées, au point de devenir une économie à part entière.

Monsieur de La Valette en sait quelque chose. Installé à Montreal, cet homme dirige la compagnie Nouvelle France en matière de pelleteries. Ses employés lui ramènent des fourures sur plusieurs centaines de kilomètres à l'intérieur du pays. C'est un commerce juteux à condition qu'il n'y ait pas de guerre.

Justement, La Valette craint que les hostilités aient repris après un moment d'accalmie. Pour en avoir le cœur net, il charge son employé Billy et son neveu Benjamin d'aller enquêter sur place. C'est leur périple que nous allons suivre à travers ce premier numéro.

Trappeur expérimenté, Billy connait le Canada comme sa poche. Surnommé le Nantais, il est incollable sur la géographie des lieux ainsi que sur les animaux et les différentes communautés indiennes qui vivent dans ces contrées. C'est un vrai guide pour Benjamin qui est loin d'égaler son savoir. Freluquet arrivé récemment de Versailles, ce jeune homme a encore tout à prouver à son oncle si il ne veut pas passer pour un imbécile.

La route est longue et périlleuse. En chemin, Billy et Benjamin viennent au secours d'un village de colons français qui se fait attaquer par des indiens iroquois, mercenaires des Anglais. Après quoi, ils prennent les rescapés sous leur aile pour les conduire en sécurité dans un fort. L'un d'entre eux attire leur intention. Il s'agit de Louise, la fille du colonel Dieudonné.

Cette attaque confirme ce que La Valette pensait. Les Anglais ont rompu le traité de paix conclut naguère. La route de la fourrure n'est donc plus tranquille et il vaut mieux la quitter au plus vite. Mais il est déjà trop tard. Soudain, le capitaine Crimbel capture notre petit monde. Responsable de la baie d'Hudson, cet individu est un peu l'équivalent de La Valette côté anglais et on le dit sans aucune pitié.

Ce premier tome sert à nous présenter la situation géopolitique du Canada à cette époque. A l'aide d'une narration lente mais très progressive, on se rend compte à quel point ce pays est immense et sauvage. Les Anglais et les Français tiennent absolument à se l'emparer et on se rend compte à quel point leurs positions sont proches les unes des autres. Par exemple, le fort Niagara dans lequel Billy et Benjamin se retrouvent enfermés n'est séparé que d'une rivière et d'une cascade avec le fort aux bœufs détenu justement par le colonel Dieudonné. Nul doute qu'une telle proximité ne peut que favoriser les conflits.

Et les indiens dans tout ça ? En fonction des tribus, ils choisissent leur camp. Les Iroquois se battent pour les Anglais tandis que les Hurons sont favorables aux Français. Mais de toute manière, on imagine qu'ils ne comprennent pas la moitié des enjeux réels de cette guerre. Achetés avec du rhum, ils seront tôt ou tard les grands perdants de la lutte pour le Nouveau Monde.

Contrairement à de nombreuses séries historiques qui se déroulent en Amérique, Les Pionniers du Nouveau Monde n'est pas un western mais traite plutôt de ce qui s'est passé avant. C'est plus original et très intéressant. On sent que les possibilités scénaristiques sont très nombreuses.

Bien évidemment, on a droit à un discours humaniste. Héros naïf et bon vivant, Benjamin fera sans doute office de lien entre les différents camps. Il a déjà commencé d'ailleurs puisqu'il séduit autant Louise que Mary, une aristocrate anglaise rencontrée au fort Niagara. Entre la gentille blonde et la tempétueuse rousse, difficile de savoir où son cœur ira se loger.

Un mot doit être dit sur le dessin. L'auteur Jean François Charles nous présente une mise en scène très ambitieuse, avec notamment pas mal de cases où de très nombreux guerriers combattent à la fois. C'est tout à son honneur. Néanmoins, il n'a pas (encore) le niveau pour l'assumer complètement. Ses traits sont loin d'être moches mais ils n'apparaissent pas non plus fantastiques comme ceux d'un Jean Yves Mitton par exemple. Heureusement, la colorisation vient déjà cacher de nombreux défauts.

Ce premier tome se révèle très correct. A défaut de crier au génie, Les Pionniers du Nouveau Monde possède du potentiel et pourrait sans doute aujourd'hui être facilement adapté en série télévisée. On attend la suite pour en savoir plus.

Note : 6,5/10